En 1630, Louis XIII établit les jésuites à la tête du collège Saint-Yves de Vannes. L’heure est alors à la réforme catholique insufflée par le concile de Trente (1545-1563), qui se traduit notamment par l’installation dans les villes d’ordres nouveaux.
Les collèges, qui ont connu une croissance rapide dans le royaume de France au 16e siècle, sont de ce fait nombreux à être confiés dans la première moitié du 17e siècle à des congrégations séculières issues de la réforme catholique, qu’il s’agisse d’oratoriens, de doctrinaires ou encore de jésuites. Ces derniers, dont la compagnie est créée en 1539, ont essentiellement une vocation évangéliaire, missionnaire et éducative.
À l’arrivée des jésuites à Vannes, le collège Saint-Yves, dont les locaux abritent aujourd’hui le collège Jules Simon, a déjà quelques dizaines d’années derrière lui. S’il a pour noyau originel un préceptorat attaché à la cathédrale depuis le début du XIVe siècle, sa création à proprement parler est décidée en 1574 par la communauté de ville, qui acquiert un terrain place du Marché – actuelle place Maurice Marchais – et y fait faire les travaux nécessaires à l’installation du collège. La communauté de ville peut notamment compter sur le soutien de l’évêque de Vannes et de particuliers comme Jan Briçon et René d’Arradon. Plusieurs prêtres ou laïcs se succèdent d’abord à la tête de l’établissement, puis des négociations débutent en 1622 avec la compagnie de Jésus à l’occasion de la venue d’un père jésuite pour l’Avent et le Carême. Elles aboutissent le 7 mai 1629, date à laquelle la communauté de ville de Vannes décide de confier le collège aux jésuites, en augmentant ses revenus de 500 livres et en y adjoignant les sommes de 18 000 livres pour l’aménagement des bâtiments et de 2 000 livres pour l’ameublement des nouveaux venus. Les jésuites prennent en charge les quatre classes du collège, de la classe de rhétorique à la quatrième. Ils y ajoutent progressivement d’autres classes ainsi que des chaires de philosophie et de théologie. Si la langue latine et la connaissance des auteurs anciens sont au cœur de leur enseignement, ils enseignent également d’autres matières comme les sciences, l’histoire, la géographie ou encore le théâtre. Sur leurs bancs passent d’ailleurs quelques élèves devenus plus tard célèbres, à l’instar de l’écrivain sarzeautin Alain-René Lesage.
Au siècle suivant, la puissance acquise par les jésuites dans le royaume et leur attachement à l’église romaine les met cependant en opposition avec les jansénistes, gallicans, et de nombreux parlementaires, qui jugent aussi leur morale trop relâchée. Le 27 mai 1762, le parlement de Bretagne prononce la dissolution de la société des « soi-disant jésuites », leur ordonnant d’évacuer les collèges qu’ils dirigent en Bretagne le 2 août au plus tard. Les jésuites quittent donc le collège de Vannes après 133 années d’enseignement. Ils continuent à essuyer des revers les années suivantes : chassée du royaume du Portugal, de France, ou encore d’Espagne, la compagnie est supprimée en 1773 par le pape Clément XIV et nombre de ses membres trouvent refuge auprès du roi de Prusse. Après son rétablissement par Pie VII en 1814, il faut attendre aux jésuites 1850 pour enseigner de nouveau à Vannes, dans le tout nouveau collège Saint-François-Xavier.
Sources d’archives aux Archives du Morbihan
L’essentiel des documents d’archives concernant la présence des jésuites à Vannes avant la Révolution est conservé dans le fonds du collège Saint-Yves (D 1-61). Comprenant des documents allant de 1419 au XVIIIe siècle, ce fonds apporte des informations sur la fondation du collège et l’arrivée des jésuites, sur les biens de l’établissement - notamment la liquidation des biens des jésuites en 1762 - et sa comptabilité ainsi que sur le personnel, l’enseignement ou encore la bibliothèque du collège.
Orientations bibliographiques
- ALLANIC (Joseph), Histoire du collège de Vannes, Rennes, Oberthur, 1902. [HB 203]
- COMPERE (Marie-Madeleine), JULIA (Dominique), Les Collèges français (XVIe-XVIIIe siècles). Répertoire 2 : France du Nord et de l'Ouest, Paris, INRP-CNRS, 1988.
- COMPÈRE (Marie-Madeleine), JULIA (Dominique), « Les Collèges sous l'Ancien Régime. Présentation d'un instrument de travail », in Histoire de l'éducation, n° 13 (déc. 1981), p. 1-27.
- DAINVILLE (François de), L’éducation des jésuites (XVIe-XVIIIe siècles), Paris, les éditions de minuit, 1978.
- MARSILLE (Louis et Henry), « Les jésuites à Vannes (1630-1901) », in DELATTRE, Pierre, Les Établissements des Jésuites en France depuis quatre siècles, Enghien Wetteren (Belgique), fascicules 18-19, 1957. [RB 310]